La Grande Réserve, Caspar David Friedrich (Vade-mecum 2)

La Grande Réserve, Caspar David Friedrich (1874-1840). Huile sur toile peinte ca. 1832, 73,5 × 102,5 cm.

Probablement ma madeleine de Proust en peinture : dans ce tableau composé comme une photo prise en grand angle, l’espace de la peinture est vaste, il tend vers l’infini. Les formes étendues des nuages répondent aux marais qui se dilatent sous l’effet optique de l’arrondi du sol. Le point de fuite amène notre regard à se concentrer sur l’horizon, matérialisation de l’infini dans le genre du paysage peint. La ligne bosselée dessinée par la cime des arbres contraste avec les deux espaces supérieur et inférieur qui la bordent, le ciel et le sol. C. D. Friedrich a mis son expérience de théosophe au service de sa peinture : ses paysages sont emprunts d’une forme immense de sagesse parfois inquiétante, parce que questionnante. L’homme y figure la plupart du temps en petites dimensions, seul dans un monde vaste, dont la connaissance doit se défricher, par strates. L’équilibre formel et chromatique de cette toile me procure encore un grand apaisement quand je la regarde.

Mots et toile

Peintures murales du tumulus de Takamatsuzuka (Vade-mecum, 1)

Visage féminin, paroi ouest, tumulus de Takamatsuzuka

Visage féminin, paroi ouest, tumulus de Takamatsuzuka


Le corpus des peintures murales antiques et médiévales des civilisations orientales et occidentales n’est pas le plus fourni des répertoires artistiques : les pigments vieillissent, les parois s’affaissent, craquèlent ou moisissent. Si les murs peints « a fresco » de l’époque moderne et renaissante ont donné une belle postérité à la fresque, cette dernière n’a toutefois rien à voir avec la peinture murale. Celles de Takamatsuzuka, de l’époque où elles sont datées, se fichent bien d’être la réalisation d’artistes chinois sur le sol nippon… C’est même, au contraire, là que réside un de leurs intérêts.
Takamatsuzuka Peinture murales

Peintures murales du tumulus médiéval de Takamatsuzuka, Azuka, Japon, 7e s. de notre ère.


L’ensemble de peintures murales de Takamatsuzuka (district d’Hiraka, Asaka-Mura, Japon) a été découvert en 1972. Le tumulus à vocation funéraire comportait un ensemble de peintures murales daté du 7e s. de notre ère, une exception au Japon. Cet ancien « tumulus mortuaire du grand sapin » est désormais Trésor National, une distinction toute nippone qui montre du doigt grâce à une politique active de protection et de conservation les plus précieux des biens culturels existants. Ce raffinement dans la classification n’empêche pas d’apprécier le bon état de conservation des peintures de Takamatsuzuka, qui finirent par être déposées en 2007 pour enrayer les proliférations de moisissures.
Peinture murale du tumulus de Takamatsuzuka, Azuka, Japon, 7e s. de notre ère.

Peinture murale du tumulus de Takamatsuzuka, Azuka, Japon, 7e s. de notre ère.


Takamatsuzuka est un monument funéraire de forme circulaire dont certaines parois intérieures sont peintes de scènes représentant des courtisanes peintes dans le style Goguryeo, une civilisation Coréenne très ancienne (37 av. J.-C.).
 

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Vade-mecum

Introduction à l’intérieur feuillu de mes cahiers, je posterai, à une périodicité sans doute fantaisiste, la transcription des innombrables fichiers que j’emmagasine frénétiquement. Ce vade-mecum, mon memento artis, se déroule comme la liste des personnalités (réelles ou fictives) et des oeuvres (littéraires, plastiques, musicales, scientifiques) qui me touchent, me nourrissent, me font grandir, me dérangent. Il n’a aucune prétention encyclopédique, ne se veut pas un inventaire. Pas d’exhaustivité mais de l’exclusivité, au cours de mes envies, des rencontres, et que peut-être vous partagerez.

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